Chapter 1 Le tube cathodique : une technologie qui passe le relais aux écrans plats.
Inventé au début du XXeme siècle, le tube cathodique a permis de
nombreuses applications comme la télévision, les ordinateurs, les
oscilloscopes... Actuellement totalement maîtrisée et très rentable, la
technologie des CRT voit cependant son avenir s'obscurcir. Son poids et sa
taille en sont les causes principales. Nous recherchons des écrans toujours
plus grands, toujours plus nets pour plus de confort visuel. Les CRT sont
inconcevables, économiquement et en terme de place et de poids, au-delà d'une
diagonale d'un mètre. De plus, la consommation électrique d'un tel dispositif
n'est pas négligeable et devient une troisième contrainte là ou l'énergie se
fait rare (bateaux, avions, navettes spatiales...). C'est dans cette optique
que de nombreuses technologies à écrans plats ont vu le jour. La plus connue est certainement la technologie cristaux liquides (LCD). C'est elle qui équipe les ordinateurs portables, et beaucoup d'autres dispositifs d'affichage. Il existe aussi les écrans électroluminescents (EL), les écrans à émission de champ (FED) et les écrans à plasma (PAP). Toutes ces technologies offrent des écrans plats. On peut ensuite les différencier par la qualité d'image qu'elles produisent, par leur coût économique et leur consommation électrique.
1.1 Le tube cathodique : l'un des premiers dispositifs d'affichage
Les travaux réalisés par l'allemand Karl F. Braun en oscillographie cathodique et par l'italien Guglielmo Marconi suscitèrent l'intérêt du Russe Boris Rosing qui, en 1911, réalisa le premier tube cathodique. Ce tube sera repensé et amélioré par un autre Russe, Vladimir Zworykin (brevet de 1923), et il peut être considéré comme l'ancêtre de nos téléviseurs. Les principes de fonctionnement de ces tubes cathodiques ainsi que ceux des tubes caméras1 sont les mêmes qu'actuellement.
Voici un bref descriptif du fonctionnement d'un tube cathodique : (Voir la figure ??).
Figure 1.1:
Schéma simplifié d'un tube
cathodique
Une cathode (1) est portée à incandescence et émet un faisceau d' électrons
(2). Ces électrons sont accélérés par un anneau (3) qui a le rôle d'une
anode. L'écran (6) est constitué d'une mosaïque de luminophores (7). Lorsque
le faisceau d'électrons rencontre l'un de ces points, celui-ci devient
lumineux sous l'effet du courant qui le traverse : on appelle cela un
<<spot>>. Pour diriger le faisceau d'électrons, on dispose autour de celui-ci
des plaques déviatrices (4) et (5). Lorsque ces plaques (en métal) sont
soumises à un potentiel, le faisceau d'électrons est dévié vers la plaque dont
le potentiel est le plus haut. Les plaques verticales (4) servent à déplacer le faisceau horizontalement et les plaques horizontales (5) verticalement. On module le potentiel de ces plaques pour créer une trajectoire du spot. Le standard est de balayer l'écran ligne par ligne comme indiqué sur la figure ??.
Figure 1.2:
Balayage de l'écran d'un tube
cathodique ligne par ligne.
Pour obtenir une modulation du signal lumineux émis par les luminophores, on
module la tension appliquée à l'anode. Pour obtenir une image en couleur, on
utilise trois tubes : un pour le rouge, un pour le bleu et un pour le
vert2. Un
point est formé de trois luminophores, chaque tube étant associé à son luminophore respectif.
On voit tout de suite pourquoi un tel type d'appareil ne convient pas aux écrans
de grande taille : La profondeur du système (cathode + anode + plaques ) est
proportionnelle à la diagonale de l'image. Rapprocher de trop les plaques
déviatrices de l'écran rend le spot flou sur les bords de l'écran et donc détériore l'image.
1.2 Une technologie concurrentielle : les écrans plats
1.2.1 Les écrans passifs
La caractéristique fondamentale des écrans passifs est qu'ils ne produisent pas de lumière et doivent être éclairés par une source extérieure (<<backlight>>). Ils sont représentés par les écrans à cristaux liquides (LCD) qui est la technologie d'écran plat la plus répandue. Elle est très au point dans l'application des ordinateurs portables en particulier. Voici un bref descriptif du fonctionnement de tels écrans.
Les écrans à cristaux liquides : LCD
Figure 1.3:
La modulation de la lumière
par les cristaux liquides. Source : http://www.sharp.co.jp/
Les cristaux liquides sont des matières organiques qui ont la propriété de
modifier la propagation de la lumière, plus exactement sa polarisation,
lorsqu'ils sont soumis à un champ électrique. Au repos, leurs molécules de
formes allongées s'ordonnent de manière parallèle. On dépose les molécules
dans une plaque gravée de sillons. Elles vont s'aligner dans ces sillons. Le
principe est le suivant : on place les cristaux liquides entre deux de ces
plaques parallèles, l'orientation des sillons de l'une étant perpendiculaire à
l'orientation des sillons de l'autre. Lorsqu'elles sont au repos, l'orientation des molécules va passer d'une orientation à l'autre (voir la figure ??). L'écran est rétro-éclairé avec une lumière polarisée parallèlement aux sillons de la première plaque. Sa polarisation est guidée par les molécules et après une rotation de 90° elle passe par un deuxième filtre polarisant. Sous l'effet d'une tension de commande, les molécules vont progressivement s'orienter dans le sens du champ électrique et la lumière sera bloquée par le deuxième polariseur. Chaque pixel de l'image est constitué d'une cellule de ce type devant laquelle est placé un filtre rouge, vert ou bleu.
La principale difficulté réside dans le système de commande des pixels. Le
système à matrice passive utilisé dans les premiers ordinateurs portables est
beaucoup trop lent pour convenir au flux d'images vidéos. Il faut donc
employer des matrices dites actives, constituées de transistors en couche
mince TFT (Thin Film Transistor). Ces matrices assurent une commutation rapide
mais sont très difficiles à réaliser. Plus la taille de l'écran augmente, plus
grand est le nombre de transistors et plus importante est l'augmentation des risques de défaut. Un écran de 20'' semble être une limite technologique au-delà de laquelle peu de constructeurs se sont risqués. L'angle de vision (voir figure ??) naturellement réduit de l'écran LCD est une autre contrainte pour son adaptation au marché de la télévision.
Figure 1.4:
L'angle de vision est l'angle
à partir duquel l'écran devient noir
Cette description reste sommaire, car il existe de nombreuses variantes de
structures et de types de molécules pour la réalisation des panneaux
LCD. L'angle de vision réduit s'améliore progressivement par la mise en oeuvre
de diverses solutions. Le prix d'un écran de 6 × 8 pouces est
d'environ $ 5 (30 FRF) par pouce carré (contre 10 l'année dernière). On trouve des écrans
d'une dagonale de 15'' pour environ 15 000 FRF.
. La technologie LCD connaît un beau succès avec les ordinateurs portables et
les vidéo-projecteurs mais reste coûteuse et inadaptée pour les écrans de grandes dimensions.
1.2.2 Les écrans émissifs
Ils génèrent eux-mêmes leur propre lumière via l'excitation de luminophores de deux façons :
-
la catholuminescence :
ce sont des électrons qui viennent exciter les luminophores. C'est le cas des écrans à émission de champs (FED) ou des tubes cathodiques (CRT).
- la photoluminescence :
ce sont des photons UV qui viennent exciter les luminophores. C'est le cas des panneaux à plasma (PAP) et des écrans électroluminescents (EL).
Les écrans à émission de champ ou F.E.D
Leur principe de fonctionnement est similaire à celui des tubes
cathodiques. En fait, l'écran est composé d'une mosaïque de tubes cathodiques
miniatures. Les micro-pointes bombardent les luminophores d'électrons qui vont
les exciter (voir figure ??). L'écran est formé de deux dalles de
verre. Des luminophores rouges verts et bleus et des électrodes transparentes
en ITO3, qui jouent le rôle d'anodes, recouvrent la
dalle avant. La face arrière est recouverte de micro-pointes déposées sur des
bandes de métal en colonnes. Entre les dalles de verre sont placées des lignes
métalliques possédant des trous. Un pixel est l'intersection d'une colonne et
d'une ligne. La cathode de chaque pixel comporte 2000 micro-pointes. Lorsqu'on
applique une différence de potentiel suffisante entre une ligne et une
colonne, les électrons sont émis par les micro-pointes et accélérés vers le luminophore (voir figure ??).
Figure 1.5:
Schéma de principe d'un écran
à émission de champ. Source : http://www.pixtech.com/
Pour le moment, seuls des écrans de 5 à 6 pouces ont été montrés par les
constructeurs. La qualité d'image est bonne sous une lumière ambiante. Ce type
d'appareils présentent des avantages certains, mais leur taille restreinte
limite leur utilisation à des applications très spécialisées (instrumentation,
armée, ...). Une des limitations possible est la destruction progressive des pointes par bombardement ionique si le vide n'est pas fait. Le laboratoire Français LETI à Grenoble a mis au point le 1er écran à micro-pointes fonctionnant en mode télévision. La société Pixel à Aix en Provence a été créée pour développer et commercialiser ce produit. Aucun prix n'a été communiqué mais on peut penser qu'il est assez bas pour concurrencer les autres technologies.
Les écrans électroluminescents ou E.L.
Cette technologie utilise la propriété de certains matériaux qui deviennent fluorescents lorsqu'ils sont traversés par un courant. Le matériau électroluminescent est pris en sandwich entre deux électrodes de nature chimique différente. L'une injecte des électrons, l'autre des trous. Un empilement de ces trois structures forme la couche (1). Quand un électron et un trou se trouvent à une distance assez faible, cela entraîne la formation d'un exciton (singulet ou triplet). Seule la désexcitation de l'exciton singulet donne un photon. Ce procédé électroluminescent s'appelle light-emitting diode.
Figure 1.6:
Structure d'un écran électroluminescent
à couche mince (TFEL) couleur à filtre
Les écrans sont fabriqués avec des couches minces. On appelle cette structure TFEL (thin-film electroluminescent). Chaque couche joue un rôle différent (voir figure ??). La couche centrale (1) émet de la lumière lorsqu'elle est traversée par un champ électrique suffisant (de l'ordre de 1,5 MV/cm). A cause de ce champ élevé, une imperfection dans l'empilement des couches minces produirait un court-circuit qui dissiperait dans celui-ci une quantité d'énergie destructrice pour le phosphore. Pour palier ceci, on dispose de chaque côté de la couche centrale des couches limitant le courant : des isolants (2) dans ce cas présent. Les électrodes (3) permettant de créer le champ électrique sont disposées de part et d'autre des isolants (2). Pour ne pas bloquer la lumière émise par la couche centrale, l'électrode face à l'observateur est transparente (ITO). L'obtention de la couleur se fait en disposant des filtres (4) rouges verts ou bleus devant la cellule correspondante.
Les écrans électroluminescents présentent de réels avantages par rapport aux PAP ou aux LCD (bonne résolution, bon contraste et faible consommation). L'application de ces panneaux est actuellement limitée au domaine de l'affichage de contrôle d'appareillages industriels et médicaux. Le prix d'un écran de 6 x 8 pouces est de 15 $ par pouce carré soit plus du double de la technologie LCD.
Les panneaux à plasma ou PAP
Cette technologie se base sur l'émission UV d'une décharge électrique d'un
gaz. Comme dans toutes les technologies à écran plat, l'image est décomposée
en pixels et chaque pixel est décomposé en trois cellules où les photons UV
sont convertis en lumière visible par des luminophores rouges, verts ou bleus
recouvrant chacune des cellules élémentaires. Le chapitre suivant explique en
détail le fonctionnement d'un tel appareillage, nous ne nous y attardons donc pas ici.
Les applications des écrans à plasma se trouvent essentiellement dans le
domaine des écrans de grande taille (plus d'un mètre de diagonale voir
figure ??) car c'est la seule technologie qui ait fait ses preuves
dans ce domaine. Pour des tailles d'écrans inférieures, les PAP ont aussi des
résultats intéressants mais les écrans à cristaux liquides sont très
performants malgré leur faible angle de vue (voir figure ??).
Figure 1.7:
Comparaison de l'angle de vue
entre un écran à plasma et un écran à cristaux liquides. Source : http://gemini.fujitsu.co.jp/
Les CRT ont démontré depuis longtemps qu'ils produisaient une image de grande
qualité mais pour les diagonales supérieures à un mètre, leur encombrement et
leur poids deviennent rapidement prohibitifs : par exemple, pour un écran de 40
pouces (1 mètre), le poids et la profondeur d'un écran à plasma sont
respectivement de 25 kg et 10 cm contre 150 kg et 100 cm pour un tube à rayon
cathodique pour une même consommation de 350 W (voir figure ??).
Figure 1.8:
Comparaison entre un écran à
plasma et un écran à tube cathodique pour un écran de 42 pouces. On voit
sur ces figures l'avantage des PAP sur le poids et l'encombrement par rapport
aux CRT. Ces données proviennent de l'entreprise Fujitsu.
Source : http://gemini.fujitsu.co.jp/
Le prix prohibitif pour l'instant reste un frein à <<l'explosion>> du marché des écrans à plasma. Les prix varient beaucoup suivant la diagonale de l'image. Par exemple, un écran de 40'' coûte de 9 995 $ (60 000 FRF) à 11 000 $ (66 000 FRF). Un écran de 50'' coûte environ 25 000 $ (150 000 FRF). Ces prix sont tirés du site d'Advanced Display Technology sur http://www.adisteck.com et sont archivés en annexe (voir annexe ??). Des entreprises japonaises prévoient cependant de vendre courant 2000 des écrans 40'' entre 20 000 et 25 000 Frs, ce qui reste encore élevé.
Figure 1.9:
Ecran à plasma d'un mètre de diagonale
1.3 Le marché des écrans plats, un avenir prometteur ?
Face au <<boom>> du marché des écrans plats tous confondus, les chiffres
obtenus restent approximatifs. Beaucoup de ces chiffres se basent sur des
articles publiés en 1998, et en deux ans, ces parts de marché ont sans doûte
changées. Cependant, on peut considérer que les prévisions faites fin 1998
constituent une approximation correcte de ce que sera le marché des écrans plats en 2002...
Actuellement estimé à près de 13 milliards de dollars, toutes tailles
confondues, le marché des écrans plats devrait tripler d'ici trois ans. Selon
une récente étude de l'Idate, le marché mondial pourrait atteindre 22 milliards de dollards en 2002 et 43 milliards de dollars en 2003.
Le marché des LCD a atteint 8,7 milliards de dollars avec un taux de croissance
de 20% en 1998 [marche_lcd]. Ce taux élevé est dû notamment aux
nombreuses applications à venir dans le domaine de l'électronique publique. Ce
marché devrait atteindre 15.5 milliards de dollars en 2002.
Le marché de la technologie à plasma était en 1996 de 300 millions de dollars
dont 44% pour le domaine militaire, 26% pour la visualisation pour station
de travail et autant pour l'industrie. Les prévisions
annoncent un marché de 4.5 milliards de dollars en 2002 pour cette
technologie.
La technologie EL a un marché plus petit, égale à 600 millions de dollars dont
une grande part (supérieure à 50%) dans les écrans pour station de
travail. Son taux de croissance annuel est évalué à 10%. Ce marché devrait
atteindre 1 milliard de dollars en 2002
La technologie à émission de champ (FED) devrait atteindre en 0,4
milliard de dollars en 2002.
Face à la difficulté à réaliser des écrans LCD de grande taille et le peu d'espoir laissé aux écrans électroluminescents couleurs, l'écran à plasma couleur est un prétendant sérieux dans le domaine de la visualisation à écran plat, plus précisément pour les écrans de grande dimension. Actuellement, c'est la seule technologie qui a fait preuve de faisabilité pour des tailles supérieures à 1 mètre, avec une qualité d'image comparable à celle des CRT.
- 1
- déjà, en 1899, le physicien allemand Zenneck réalise la première caméra à tube sous vide.
- 2
- les couleurs primaires en video sont le rouge, le vert et le
bleu. L'absence de ces couleurs donne du noir et l'addition du blanc.
- 3
- Indium Tin Oxyde.